Le travail, et les obligations qui en découlaient, m'avait fortement contraint à négliger des pans entiers de mon existence et je n'étais pas sans m'en vouloir. Moi qui croyait que je bosserais moins une fois à la tête de mon entreprise je dois admettre que je faisais fausse route sur toute la ligne. D'ailleurs, à la réflexion, je crois bien que c'était afin de me sentir un peu moins coupable que je m'étais permis d'acheter une nouvelle voiture à ma mère, et de régler le solde de son prêt hypothécaire, mais comme elle me le rappelait si bien :''la vie ne se limitait pas qu'aux biens matériels que l'on pouvait posséder''. D'une certaine façon elle cherchait à me faire comprendre qu'elle aimerait que je sois davantage présent dans sa vie et je ne pouvais que m'en vouloir d'avantage de ne pas pouvoir combler ses désirs.

Profitant d'un rare moment de répit, savourant ce congé que j'avais décidé de m'offrir, je m'étais permis de me balader dans les rues du centre-ville de Portland. La fatigue finissant par s'emparer de mes jambes, la faim poussant mon estomac à pousser quelques grognements, je finis par m'arrêter devant la façade du Starbuck local. Poussant la porte je me dirigeai d'un pas décidé vers le comptoir bien déterminé à placer ma commande. Bien qu'à la tête de ma boîte, gérant des actifs dont la valeurs pouvaient s'évaluer à plusieurs dizaines de millions de dollars, je n'en demeurais pas moins quelqu'un de simple et mes choix alimentaires s'en voulaient un exemple plus que probant.

Ayant commandé un croissant jambon-fromage, accompagné d'un lait frappé, je me dirigeai vers l'une de ces tables donnant sur la terrasse et je finis par déposer le cabaret afin de prendre place sur un siège. Me poser allait me faire grandement du bien puisque j'avais les jambes pour ainsi dire morte. Regardant quelque peu autour de moi, un vieux réflexe, je finis par regarder le contenu de mon plateau et rapidement j'empoignai mon croissant afin d'en prendre une bouchée. Un pur délice.

Ma vie était bien différente des femmes de tous les jours et parfois, je devais avouer que je les enviais. J’aimerais connaître aussi des nuits paisibles et calmes, pouvoir me lever et que mon petit-déjeuner soit apporté au lit, avoir un homme aimant avec qui partager des habitudes, mais je n’avais rien de tout ça ! Mes parents me répétaient sans cesse que l’armée aller finir par me tuer à petit feu ou bien que j’allais devenir folle à force de voir des choses atroces et qui voudrais d’une femme qui peu partir à tout moment pour des mois ? Quel homme tiendrait sans avoir de rapport sexuel durant des mois ? Finalement le fait de savoir qu’il pourrait aller voir ailleurs était sûrement la cause de mon célibat. Je travaillais à longueur de temps avec des gars, qui après des mois loin de leurs femmes finissent par laisser leurs pulsions sexuelles ressortir, viol, prostituer ou bien encore violer leurs propres collègues étaient souvent au rendez-vous. Mes retours de mission étaient un moment de soulagement, j’avais toujours hâte de revoir ma famille et mes amis, souvent, j’étais excitée à l’idée de retrouver mon domicile, de pouvoir prendre un bon bain, dormir dans un lit confortable… Mon dieu rien que d’y penser, j’en salivais limite. 

Il y a quelques semaines que je suis revenue de mission, le fait de devoir me remettre dans le bain de la société n'était pas toujours des plus faciles, mais ça me faisait du bien de pouvoir troquer l’uniforme de l’armée pour celui de la féminité, les premiers jours, je devais avouer que porter des talons à nouveau était d’une souffrance, j’avais l’impression de revenir des années en arrière lorsque j’avais reçus ma première paire d’escarpin et qu’elle me faisait souffrir atrocement, mais bon, j’avais connue pire et ce n’était pas la douleur qui me faisait peur. J’étais bien contente de ne plus avoir l’odeur du sable et du sang en guise de parfum, je pouvais retrouver des odeurs qui m’avaient tant manquer, comme le doux parfum de ma mère ou bien celui de la bonne cuisine. Pouvoir retrouver une vie normale était un rêve pour nous soldats, se lever plus tard, profiter d’une journée paisible, mais s’était aussi des moments difficile, la peur était souvent présente, le moindre bruit suspect pouvait parfois nous donner de drôle de réaction et sans compter les nombreux cauchemars qui envahissaient nos nuits. 

Je m’étais levé ce matin de bonne heure, une habitude avec l’armée et il me faudra sûrement un certain temps avant de pouvoir refaire quelques grasses matinées, alors que mon réveil n’afficher que les cinq heures trente du matin, je laissais échapper un soupire de désespoir finissant par sortir de mon lit et passer me rafraîchir le corps avant d’enfiler ma tenue de combat, enfin devrais-je dire ma tenue de sport, après avoir fait un petit échauffement, je m’étais mise en route pour mon footing, courir était le meilleur moyen pour moi de garder la forme et il fallait l’avouer un corps comme le mien demander d’être entretenue. Après un bon moment intensif, je pouvais enfin rentrer prendre une bonne douche, un moment que j’appréciais énormément, l’eau chaude ruisselant sur mon corps, l’odeur de mon savon et surtout le calme plat ! Une fois sortie de ce moment de détende, j’enfilais une jolie petite lingerie rouge, un haut de la même teinte et un pantalon en simili cuire noir, une paire d’escarpins assortie à ma blouse. Je repassais par la salle de bain pour entretenir ma superbe chevelure et me faire une petite retouche beauté rien de bien extravagant, mais juste assez pour me sentir plus féminine. J’enfilais ma veste en cuir et je quittais mon domicile pour me rendre en ville pour y déjeuner, n’ayant pas eu le temps de faire des courses, mon frigo et mes armoires ressemblait plus au désert plutôt cas un buffet à volonté. Je marchais dans la rue tranquillement avant de tourner dans une ruelle qui aller me guider jusque dans le centre-ville et plus précisément vers le Starbucks où j’allais y prendre mon délicieux frappucino. 

J’étais face à ma destination, le passage pour piétons me séparer de mon petit-déjeuner et lorsque ce fut mon tour, je traversais les lignes blanches avec assurance, m’avançant vers la terrasse des lieux ou mon regard venait à se poser sur un homme dégustant son croissant, il ne m’était pas inconnu, en réalité il était plus que familier vu que la famille Livingstone était proche de la nôtre et ceux depuis des années. Je retirais mes lunettes de soleil qui cacher en grande partie mon visage, adressant un sourire à l’homme. 

« Blake Livingstone ! » 

Si on m’aurait dit en ce jour que j’allais croiser l’homme sur qui je fantasmais étant jeune, je ne l’aurai jamais cru. Je m’avançais vers lui, lui offrant la bise. 

« Je n’aurai jamais imaginé te voir dans un tel endroit. » 

J’observais Blake de haut en bas, il avait toujours autant de charisme et son sourire était toujours le même.